Luminantisme

Les temps changent, d'autres non.

Jadis, dans nos contrées, un groupe de personnes, une Église, avait lu, croyait et, les rangs grossissant, finirent par imposer un dogme à la société.

Si le fond pouvait être louables, tout ceci pris une telle forme que des actes, paroles, pensées se trouvèrent interdits, réprimandées.

Qu'on ignorât les codes ou qu'on fût rebelle, on devint ainsi pointé du doigt, jugé, banni de la communauté voire emprisonné ou torturé en place publique. On avait déjà le goût du spectacle.

Hors du dogme, point de salut. Choisir une autre voie était une hérésie (latin haeresis, opinion, du grec hairesis, choix, de haireîn, saisir). Tout le monde devait, d'après cette élite auto-proclamée, ces dépositaires du mode Unique, obéir et se conformer, au-delà de comprendre ou savoir.

Crainte, pression, ignorance...

Un jour des hommes réagirent et luttèrent contre l'obscurantisme grandissant. Une nouveau courant de pensée, les Lumières, ouvrit une brèche qui influa sur la philosophie puis sur la science, redéfinissant ainsi par de nouvelles règles, l'Univers.

Le raisonnement, l'objectivité, l'expérience, la mesure, le témoignage, la collecte d'informations, le scepticisme, le protocole, la répétitivité venaient pondérer les croyances, les superstitions, les fantaisies, les appréciations somme toutes subjectives, les traditions, les rumeurs, les idées reçues, etc.

Des siècles passèrent. La Lumière pris le pas sur l'Obscur, les superstitions devinrent sujet de moquerie, les croyances écrasées par des explications détaillées et implacables, dieux et Dieu furent regroupés et balayés d'un revers de microscope.

Il y a quelques décennies, Un BRAve mouStachu au bon SENS chantait :
Mais se touchant le crâne, en criant " J'ai trouvé "
La bande au professeur Nimbus est arrivée
Qui s'est mise à frapper les cieux d'alignement,
Chasser les dieux du firmament.

Le courant de pensée Lumineux s'imposa ainsi à son tour dans les esprits. Fascinant, clair, éclatant, irréfutable, comme un feu d'artifice aux reflets infinis...

Le sens du Réel avait muté. L'ombre fut chassée, bannie. De nos jours, ce courant de pensée éblouit et subjugue une nouvelle élite. Cette nouvelle Église s'y réfère donc pour imposer, juger, ostraciser une foule d'hérétiques qui ne se conformeraient pas aux injonctions pourtant rationnelles et lourdes d'arguments. Injonctions mêlant morale et statistique, confondant information et connaissance véritable.

Il y a donc bien deux circonstances qui empêchent de voir, de distinguer les choses : l'obscurité et l'éblouissement.

L'obscurantisme d'hier a finalement été remplacé par une sorte de "Luminantisme".
Les hérétiques restent les hérétiques.
Les ouailles restent les ouailles.

Jadis, en matière d'autorité, de validité, de Vérité, de Bien, on se référait par commodité à l'homme en robe noire.
Depuis quelques dizaines d'années, c'est l'homme en blouse blanche qui valide le Réel.

Les temps changent, les couleurs et les habits aussi. Tantôt yin, tantôt yang, les situations, les processus eux sont les mêmes. Un même plateau d'échec, on change juste de côté.

Alors? On recommence la partie?

olivier r.
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